Difficile de passer à côté de l’actualité des dernières 24H
Au delà de toutes les questions politiques qui entourent ce drame, la question que tout le monde se pose c’est POURQUOI ?
On a envie de comprendre. Pourquoi ? Pourquoi en arrive-t-on là ? Pourquoi est ce qu’un jeune étudiant politiquement engagé (un peu normal quand on a 19 ans, qu’on fait sciences po Paris, qu’on sort d’une leucémie… ) se fait tabasser à mort comme ça ? Peu importe s’il était activiste, peu importe s’il était peut être provocateur avec ces groupes extrémistes, peu importe tout, il ne méritait pas de se faire tabasser à mort par des gros fachos cinglés.
http://www.rue89.com/2013/06/06/clement-meric-militant-antifa-radical-introverti-243063
Le drame, c’est que cette violence, elle n’est pas soudaine. Elle existe bel et bien, plus ou moins visible à titre individuel, plus ou moins intense mais je trouve que nous vivons dans une société violente. Une violence multiformes qui s’exprime parfois par des événements comme celui là, qui tout à coup nous laissent sonnés, bouleversés, ne comprenant pas ce qui se passe …
On imagine alors plein de raisons : la crise économique, sociale, la violence à la télé, les déchirures familiales, le manque d’éducation, le manque de structure de vie, le manque d’encadrement familial, le manque de tout … On essaie de comprendre, POURQUOI ? Pourquoi certains basculent totalement de l’autre côté ?
Moi la violence je la côtoie quotidiennement. J’ai été exposée jeune à la violence. Quand je suis rentrée des Caraïbes dans mon école bourgeoise des Yvelines, j’en ai pris plein la gueule pendant un an parce que j’étais un peu décalée et différente. Je parlais anglais, je ne connaissais même pas le gros mot merde. Ma sœur plus jeune, a vécu des années de souffrance à l’école. Un miracle qu’elle ne se soit pas suicidée. Insultes, bandes entières contre une, racket, moqueries, coups, elle a tout eu parce qu’elle était un peu différente.
Etudiante, je me suis fais insulter, serrer dans le RER par des mecs qui suçaient leur majeur en me regardant, un cutter à la main… j’ai tenu le coup en me disant que si je restais sereine j’arriverai entière à la dernière station où je descendrai enfin … J’ai défendu des adolescentes qui se faisaient emmerder par des bandes de salopards sans respect, seule dans le wagon sans un mec qui se lève …
J’ai sorti par le col des petits cons qui essayaient de voler des chocolats dans le magasin de ma mère à une autre époque…
Mon autre jeune sœur qui va rentrer au lycée m’a raconté des scènes de violence inouïes dans son collège avec la C.P.E qui s’est fait tabasser à coup de barre de fer par un élève…
Et les histoires de suicides d’adolescents même d’enfants pour cause de harcèlement … c’est de la violence pure ça aussi. A tel point qu’on doit faire des campagnes de sensibilisation comme celle ci
c’est de la violence insoutenable. De la cruauté indigne.
J’ai un frère handicapé mental. Je crois qu’une de nos plus grandes angoisses à ma mère et moi c’est que mon frère se fasse agresser par des cinglés.
On a peur parce que ça arrive. On a déjà entendu des histoires comme ça … gratuitement, comme ça, juste parce que ça devait les faire délirer…
http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2009/10/29/01011-20091029FILWWW00485-handicape-agresse-3-mineurs-arretes.php
ça me rends dingue… cette violence me détruit. Pire, cette violence génère en moi une violence immense provoquée par la révolte que je ressens.
Nous sommes une espèce dangereuse nous les êtres humains. Nous avons la capacité de nous lobotomiser mutuellement, de nous embrigader sans réfléchir, de suivre comme des moutons des idées totalement absurdes, bêtes, ignobles, parce que c’est plus facile que de se voir en face et se poser les vraies questions.
Et puis il nous faut toujours des coupables. Il nous faut toujours des responsables de notre malheur. Surtout pas nous mêmes…
Il y a quand même de quoi s’interroger. Jamais on aura autant prôné la tolérance, la psychologie, l’écoute, le pacifisme et pourtant, tout le monde (moi compris) s’accorde à dire que notre société est décadente, qu’il n’y a plus de respect, que c’est l’individualisme à tout va, la quête à la jouissance personnelle, toujours plus, toujours mieux … Qu’est ce qui se passe ? Est-ce la faute à ce système que nous avons nous même crée ? Avons nous crée notre propre enfer ? Est ce que c’est cette course effrénée vers le bien-être individuel basé sur des mauvaises valeurs comme la consommation matérielle qui nous amène à cette hyper violence?
Nous sommes une société sacrément hypocrite … On critique on dénonce cette violence mais l’audience des Experts Las Vegas, Miami, Manhattan, Dexter, Nip Tuc, les films avec Ryan Gosling, même Game of Thrones cartonnent, et tous font l’apologie de la violence. Et en PRIME TIME Messieurs Dames. Alors on censure le porno mais ça ne dérange pas au film du soir que les enfants regardent des mecs qui se font tabasser, torturer, le tout avec l’hémoglobine qui va bien…
Et puis soudain, on a une aberration de politicien, M. Debré qui va déclarer que ce qui est arrivé à Clément Méric est la faute aux jeux vidéos… Décidément, il y en a qui n’ont peur de rien en politique… Alors peut être que CERTAINS jeux vidéos contribuent eux aussi à une déformation de la perception de la violence envers autrui mais faudrait peut être que Monsieur Debré remette les pieds sur terre… Le problème est global, profond… On est en train de payer des années de déconnade sociale complète.
Avec un peu de chance, tout n’est pas foutu et nous allons tous réagir individuellement à faire progresser notre société car je crois plus à la révolution individuelle que globale. Avec un peu de chance l’innocence a encore sa place dans notre société. Avec un peu de chance, les enfants pourront sortir à vélo sans risque de se faire enlever, violer et dépecer… Avec un peu de chance on pourra encore avoir un avis engagé sans risquer pour sa vie… Avec un peu de chance on pourra avoir le droit d’être différent sans être montré du doigt, jugé, critiqué et moqué.
Avec un peu de chance un jour nous deviendrons une vraie société d’humains intelligents, sensibles, tolérants, dénués de préjugés… avec un peu de chance, les enfants pourront se bagarrer à l’école, auront des genoux écorchés, des coquards et des bleus mais n’y laisseront pas leur vie.
Avec un peu de chance, les enfants redécouvriront le sens du mot enfance.
Avec un peu de chance, nous saurons redevenir plus simples, plus proches de la nature, et peut être, peut être, avec un peu de chance, chacun reprendra sa place comme il faut et la violence ne restera qu’un mauvais souvenir…
On a le droit de rêver non ?
Je n’accepte pas cette hyper violence et encore moins lorsqu’elle touche des jeunes… La jeunesse c’est pas ça … La jeunesse, ça devrait être davantage quelque chose comme ça (enfin je trouve)